L’envie ou pas d’être sage

À l’instant où j’écris ces mots, je savoure un nectar alcoolisé alors que je suis supposée travaillée.

Il n’est que 14h.

N’ayez crainte, je ne souffre pas d’alcoolisme ou d’une quelconque addiction, je suis simplement rebelle à mes heures. J’ai envie de créer mon propre cadre d’existence plutôt que de cadrer dans celui qui nous est dicté.

Je me suis arrêté cet été, en observant ma cadence. Course incessante, abnégation à des échéanciers que nous ne décidons pas, fatigue inévitable en fin de journée… C’est vraiment cela, être une mère, une salariée, une amie et une épouse?

Non merci!  

Je souhaite plutôt vivre l’enthousiasme quotidien de créer, le pouvoir exutoire de dire non, profiter du ici et maintenant sans trop réfléchir à un futur lointain, sentir que je contribue à une humanité empreinte de beauté et de solidarité, danser le matin, dessiner le soir; matérialiser mes rêves, connecter avec les autres, être entourée d’amour…

Je souhaite plutôt vivre…

Je souhaite me sentir vivante.

Personne n’est en mesure d’éclairer ce chemin qui mène à cette célébration de la vie. Ce n’est ni mon employeur, ni mon amoureux, ni mes amies… Ce n’est que moi qui peut pleinement savoir ce qui est bon pour moi.

C’est ainsi que je tronque parfois la collation santé pour une sandwich à la crème glacée, que je me lance dans milles projets alors qu’une journée n’a que 24h, que je laisse mes enfants rigoler dans leur lit alors qu’ils sont supposés dormir, et que je sirote une boisson alcoolisée à 14h de l’après-midi.

Vivre, c’est respecter son intuition et son rythme plutôt que ceux des autres.

Vivre, c’est avoir l’audace et le courage de mener sa vie tel qu’on l’entend au-delà de toutes conventions.

Je vous souhaite donc une bonne vie empreinte de douces folies qui vous ressemblent!

Oser s’exprimer ou s’affirmer

Avez-vous cette impression parfois d’être le mouton noir, celui avec l’âme rebelle qui n’acquiesce pas à la majorité? Que ce soit pour mener des luttes sociales, ou que ce soit parce que l’univers vous a parachuté dans une famille aux idées opposées aux vôtres… En somme, vous aimeriez affirmer votre individualité malgré le risque de déplaire.

Comment ne pas travestir qui nous sommes, sans heurter qui que ce soit dans l’expression de ce que nous pulse notre cœur en guise de vérité?

Faut-il oser s’affirmer, envers et contre tous?

Bref, que faire lorsque nous ne pensons pas comme les autres…

Louise Arbour, une juriste émérite ayant siégé à la Cour suprême du Canada nous conseille de tenter de comprendre la perspective de l’autre et prioriser le consensus; la dissidence lui apparaissant comme un échec.

Similairement, j’ai récemment découvert en guise de règle d’or à appliquer en marketing qu’il faut enligner les valeurs de son auditoire sur le pourquoi il ferait affaire à nos produits et services. Une fois convaincue de leur légitimé, la personne n’a pas besoin du fin détail des produits ou des services pour se les procurer. Cela se compare également aux choix électoraux: en général, les électeurs n’auront pas scruté les programmes électoraux, mais ils auront choisi l’élu ou le parti qui s’enligne davantage avec leurs valeurs.  

C’est bien beau, être diplomate, empathique, être à la recherche de consensus ou d’enlignement de valeurs, mais pourquoi ne pas également apprécier la saveur complexe d’un débat salé où tout le monde ne s’entend pas sur les mêmes assaisonnements? Pourquoi, culturellement, ne pas faire place à ce genre de débat où toutes les perspectives peuvent être entendues avec respect? J’ai parfois une écœurantite de notre recherche absolue des consensus au Québec, qui laisse peu de place aux échanges d’idées ou de perspectives. À mon sens, cette culture « anti-débat » favorise le maintien de la volonté d’une majorité au pouvoir. Les autres sont ainsi perçus tels des fauteurs de trouble, nuisant à ce faux-semblant d’harmonie collective.       

Je devrais peut-être m’inspirer de Lilian Thuram, brillant auteur de l’ouvrage « La pensée blanche ». Cet homme m’a grandement inspirée lorsque j’ai eu l’opportunité de l’entendre à l’occasion d’une conférence virtuelle. Il y dévoila que ses amis blancs manifestaient parfois étrangement plus de colère qu’il en ressentait lui-même en lien avec les situations de racisme qu’il a vécues. Il expliquait, d’une voix posée, qu’une explosion de colère ne permettait pas de dialoguer efficacement avec l’autre. Selon lui, mieux vaut tenter de comprendre les situations de racisme en puisant dans leurs sources historiques et légales; cela afin de dégager des pistes de solutions.  

Je me questionne sur l’art de s’affirmer tout en demeurant empathique, calme et respectueux dans les échanges. Jusqu’à quel point cette attitude digne d’un Saint est valable lorsque l’autre te manque de respect.

Il s’agit d’un art, celui d’être assertif : s’affirmer tout en respectant l’autre afin d’établir des relations harmonieuses. Autrement dit, c’est se respecter autant que l’on respecte les autres; ni se considérer inférieure ou supérieure à autrui, mais se considérer avec autant d’importance.

En réaction à un manque de respect, il faut d’abord logiquement émettre nos limites pour se respecter. Il est ensuite possible de se détacher de la situation et tenter d’être empathique envers l’interlocuteur.

J’aimerais ajouter l’ingrédient de l’écoute à celui du respect afin d’exprimer son opinion bien que celui-ci puisse bousculer notre entourage.

L’écoute.

À quoi bon parler si nous ne sommes pas écoutés.

Voulons-nous perdre notre énergie auprès de personnes qui s’en tiennent qu’à leurs propres interprétations du monde?

J’admire en fait les individus ayant des perspectives déterminées, mais qui garde une ouverture d’esprit et l’humilité de ne pas tout connaître. Si adresser des enjeux complexes dans une conversation avec l’autre se déroule dans l’irrespect et la fermeture, il me semble préférable de se tourner vers une autre personne.

Certaines stratégies permettraient de s’assurer de capter l’écoute de l’autre au moment d’aborder des sujets émotionnellement lourds. Je dois cette découverte à l’ouvrage « Je suis un chercheur d’or » de Guillaume Dulude, spécialiste en communications interpersonnelles.  

Si j’ai à résumer les étapes; il faut établir minimalement une relation de confiance avec la personne à qui l’on souhaite communiquer en dosant sa vulnérabilité (se révéler à l’autre avec un juste dosage). Pour s’assurer d’une écoute réelle, certains signes non verbaux seraient présents : clignements de yeux (fixer sans cligner des yeux est un indice d’être plongé dans ses pensées), légers hochements de tête, corps penché vers l’avant…

D’une autre part, Guillaume Dulude prévient que chez les personnes présentant le trait de personnalité de l’agréabilité », elles doivent s’habituer à déplaire et ne pas chercher à tout prix l’approbation des autres. Cela leur permettrait à la longue de puiser le courage nécessaire pour demeurer authentique et ne pas s’adapter perpétuellement aux autres.   

Une autre stratégie que j’ai découvert par hasard sur le web consiste en la « technique du sandwich »: débuter en adressant un aspect positif, poursuivre avec ce qui est négatif à transmettre, puis revenir à du positif. Exemple : « J’apprécie passer du temps avec toi. Cela dit, ces temps-ci, j’ai l’impression que tu as besoin de ta bulle. J’aimerais qu’on partage plus de beaux moments ensemble comme avant »…

Je terminerais cet article en vous parlant d’amour de soi et de confiance en soi. Oser s’exprimer ou s’affirmer, c’est surtout s’accorder autant d’amour qu’aux autres; et qu’à ce titre, nous devons oser exprimer nos désaccords, nos besoins, nos souhaits, ou nos limites. Cette image d’une forêt m’est apparue en méditant, où tous les arbres se font mutuellement une place, tout naturellement, afin de capter les rayons du soleil. Aucun arbre tente délibérément de prendre le soleil de l’autre, aucun arbre ne se laisse mourir pour laisser sa place aux autres; mais chaque arbre prend sa place qui lui revient au soleil.

Trouver ce que nous n’avons pas dans ce que nous avons

Sera traité dans cet article : Le rapport au matériel et au temps, profiter du sublime, le sentiment d’abondance, les désirs de l’âme et l’art de vivre danois

Par Beatrix Potter

Récemment, j’ai découvert deux études éclairantes sur le rapport au matériel et au temps, rapportées dans l’ouvrage « Se changer, changer le monde » par Christophe André, Jon Kabat-Zinn, Pierre Rabhi et Matthieu Ricard.

Je résumerais la première étude ainsi : il fut donné comme consigne à deux groupes de manipuler des billets et les placer en ordre croissant. Dans un groupe, il s’agissait de billets de banque, alors que dans le second, il s’agissait de bouts de papier numérotés. Les participants furent ensuite réunis dans une salle où on leur demanda de résoudre des problèmes de mathématique, en ayant la possibilité de s’entraider au besoin. À la fin de l’exercice, un animateur a proposé à tous de se rapprocher de lui afin de discuter de l’expérience. Comparativement aux sujets du groupe ayant manipulé des papiers numérotés, les sujets du groupe s’étant retrouvés avec des billets de banque furent moins portés à s’entraider pour résoudre les problèmes de mathématique et se sont également positionnés plus loin de l’animateur. La conclusion hypothétique est donc que le fait même de manipuler de l’argent, cela induirait une plus faible solidarité ainsi qu’une distanciation auprès des autres.

La deuxième étude traitait du rapport au temps. Il s’agissait de faire connaître l’histoire touchante du bon Samaritain à deux groupes d’étudiants en théologie. Le récit originaire de la Bible raconte que des voyageurs, à la vue d’un homme mal en point et étalé au sol, n’arrêtaient pas chemin faisant sur une route fréquentée par des brigands. Porter secours au malheureux signifiait s’exposer au risque de tomber dans un piège et être assailli par des malandrins. Un bon Samaritain, nonobstant de ce danger, est venu porter secours au blessé. Les étudiants avaient pour tâche d’écrire une histoire semblable et la réciter dans un studio d’enregistrement situé dans leur établissement scolaire. À un premier groupe, aucune limite de temps ne fut imposée. Au deuxième groupe, les délais étaient serrés afin que tous puissent produire leur enregistrement. En se dirigeant vers le studio d’enregistrement, ils rencontraient un élève simulant des difficultés respiratoires. Vous l’aurez peut-être déjà deviné, les sujets n’ayant pas de limite de temps imposée étaient significativement davantage portés à offrir une assistance à l’élève en détresse que ceux qui étaient pressés par le temps. La conclusion hypothétique est donc que par la contrainte du temps, nous agissons parfois à l’encontre de nos valeurs.

Ce que nous révèle cette étude m’a permis personnellement plus de conscience sur mon utilisation du temps afin d’être plus en cohérence avec mes valeurs.  

Connaissez-vous l’expérimentation qui avait été menée en pleine heure de pointe dans un métro newyorkais, où il fut demandé à un violoniste réputé nommé Joshua Bell d’offrir des prestations gratuites? Ce violoniste offre généralement des spectacles à guichet fermé; et voilà qu’il offrait son art dans un lieu public! Le but de l’expérience était de vérifier si à un lieu et une heure inappropriée, sommes-nous capables de nous arrêter pour admirer la beauté du monde? La réponse est tristement non. Mis à part un petit garçon qui s’était arrêté, subjugué par la musique, avant que sa mère lui somme de continuer d’avancer, ainsi que quelques dollars offerts par quelques passants, peu ont profité de cette occasion unique d’écouter la musique sublime produite par le stradivarius.

Enfant, mon père m’avait proclamé que si je ne parviens pas à m’arrêter quelques instants pour m’émerveiller d’un coucher de soleil, j’allais renier l’essence même de ce qui fait la vie. Cette parole de mon paternel m’a bien certainement marquée, car depuis, je profite consciemment du sublime qui peut nous entourer. Le sublime peut se retrouver dans les actes de bonté, ou sinon, par la beauté. Ce n’est probablement pas par hasard que nous trouvons beau ce que nous aimons.

J’aimerais à ces égards vous partager un poème de Denis Meunier retrouvé sur un coussin dans une auberge où mon amoureux et moi avions trouvé répit et paix intérieure. J’avais photographié le poème, qui témoignait à mes yeux du sublime dont nous devrions pleinement profiter :

Le bonheur est ici

Le bonheur est ici, le bonheur est bleu.

Les bonheurs sont petits, mais les bonheurs sont nombreux.

Je les rassemble, précieusement, et j’en fais le tableau de ma vie…

Ici, le lilas joyeux de mai, et là, le soleil frileux sur les planchers de janvier.

Les voyages dans les nuages pendant les siestes d’après-midi et les amis qui restent à coucher parce qu’on a bien ri après minuit.

Les livres et les soirées tranquilles, les discussions animées et les soupers en famille.

Ici, un cadre de souvenirs, et là, une fenêtre sur l’avenir…

Entre ici et là, il y a tout et rien, mais il y a surtout le bonheur dans tous les coins!

Le bonheur est ici… Le bonheur n’est donc pas dans ce que nous allons atteindre ou acquérir plus tard. L’art de vivre danois, le hygge, insiste d’ailleurs fortement sur le moment présent, une ambiance relaxante, le bonheur d’être ensemble, la connexion à la nature, prendre le temps de s’arrêter, plutôt que d’axer son bonheur sur la consommation effrénée de biens.

D’où l’importance d’être satisfait de ce que nous avons, voir même d’aller chercher ce qu’il nous manque dans ce que nous possédons déjà. En guise d’exemple, je songe au célibataire qui se morfond de ne pas être aux côtés d’un partenaire amoureux. Ne pourrait-il pas être rassasié d’amour par ses proches qui l’entourent déjà?

Une étrange loi de l’univers pour laquelle je donne mon assentiment est la suivante : en état de manque, nous attirons le manque; alors qu’en état de plénitude, nous attirons ce que nous désirons. Cette loi semble injuste pour ceux dont les besoins de base ne sont pas comblés. En état de manque, comment peuvent-ils attirer à eux la satisfaction matérielle?

Étrangement, l’abondance m’est justement apparue lorsque j’ai cessé de craindre de manquer de quoique ce soit, ou lorsque j’ai enfin cessé de croire que je ne méritais pas l’abondance, en ayant le réflexe d’offrir immédiatement à autrui ce que je gagnais. L’abondance m’est arrivée lorsque j’ai ressenti la confiance en l’avenir et que je me suis dit, simplement: “Pourquoi pas moi? Pourquoi n’y aurais-je pas droit?” Je visualisais un emploi stable, bien rémunéré, qui me permettrait de travailler à la maison tout en développant des projets créatifs dans mes temps libres. C’est exactement ce qui m’est arrivée au fil du temps.

Paradoxalement, je ne pense pas que la reconnaissance de ce que nous possédons déjà ne soit pas compatible avec nos désirs, tant qu’ils correspondent à ceux de notre âme. Je souligne ici les désirs de notre âme et non de notre égo. Comment en faire la distinction? Les désirs de notre âme nous font littéralement pétiller de l’intérieur et correspondent à qui nous sommes fondamentalement. Les désirs de l’ego répondent davantage à ce que nous souhaitons prouver aux autres afin de démontrer notre valeur.

Je vous souhaite en somme la sagacité de chercher ce que vous n’avez pas dans ce que vous possédez déjà, mais cela sans vous privez d’aspirer à plus, car vous méritez d’incarner pleinement matériellement qui vous êtes. Pourquoi pas vous?

Le pouvoir presqu’infaillible de l’esprit

Par Beatrix Potter

Sera traité dans cet article : le réalisme vs l’optimisme, le fatiguant slogan de la pandémie « Ça va bien aller », le sens de la vie et l’humilité

« Ça va bien aller »… Notre slogan national depuis le début de la pandémie au Québec. « Ça va bien aller », message laconiquement véhiculé pour masquer toutes les souffrances du quotidien vécues lors du confinement par ceux qui l’ont moins facile : une femme violentée par son mari, des parents en manque de ressources pour prendre soin de leurs enfants en situation d’handicap ou avec des besoins particuliers, des personnes seules aux prises avec un problème de santé mentale, les endeuillés ayant perdu un proche en raison de la Covid-19… « Ça va bien aller »? Non, réalistement, ça NE VA PAS bien aller pour ceux qui l’ont moins facile!

Ma psy m’encourage à utiliser la prémisse « même si … (ce qui ne va pas bien) je vais … (ce sur quoi je vais agir pour que ça aille mieux). Donc si je me prête à l’exercice : « Même si je me lève avec une boule de stress en ayant la crainte de ne pas y arriver, je vais faire de mon mieux… » Hum…

En réalité, TOUT ne va pas mal lorsque nous nous attardons à nos différentes sphères de vie. Si, dans mon cas, un surmenage récent au niveau professionnel m’a généré du stress, mes amis ont représenté un refuge ressourçant. Ma psy prône justement le « positivisme réaliste », qui mise sur l’acceptation des épreuves afin de trouver des solutions et regagner un sentiment de contrôle. Le lâcher-prise impliquerait par ailleurs non pas la résignation, mais de lâcher sa prise pour la reprendre ailleurs.

Lorsque je me suis intéressée à la psychologie positive, j’entretenais la fausse croyance qu’il s’agissait d’une approche visant à voire que le positif, tomber dans une potion magique mielleuse et rose bonbon nous forçant à sourire en permanence. Loin d’occulter les émotions négatives, la psychologie positive pourrait plutôt se résumer en la science du bonheur, visant à documenter les facteurs favorisant un état de bien-être.

Shawn Achor, un auteur américain et conférencier connu pour son plaidoyer en faveur de la psychologie positive, arrive à la conclusion que 90% du bonheur serait influencé par notre façon de percevoir ce qui nous arrive plutôt que nos conditions d’existence.

Similairement, des études dans le champ de la psychologie positive concluent que notre aptitude au bonheur serait grosso-modo constitué de :

  • 50% de capital génétique
  • 10% des conditions d’existence
  • 40% de nos habitudes ou nos activités

Je serais curieuse de connaître la composition des échantillons des études qui aboutissent à ces constats. Permettez-moi un regard critique : si nous questionnions les individus pour qui la pandémie a eu de lourdes conséquences sur leur bien-être tel qu’évoquées précédemment, je parierais que leurs conditions d’existence compteraient pour plus que 10% de leur niveau de bonheur! Le risque avec ce genre de résultats est de minimiser les impacts des inégalités sociales sur la santé mentale et de ramener le tout à une responsabilité uniquement individuelle plutôt que collective.  

Bon… Si nous oublions cette histoire de pourcentages (qui m’agace profondément en tant que sociologue), retenons toutefois l’idée générale que peu importe les difficultés vécues, c’est le regard que nous portons sur celles-ci qui peut faire toute la différence sur comment elles nous affectent. Ou encore, cela peut même nous amener à faire un sens à notre vécu éprouvant.

J’ai récemment entendu une charmante histoire de l’écrivain Charles Péguy sur cette thématique. Puisque mon cher ami Annibal Barca vous a raconté l’histoire de Sisyphe dans son dernier article (http://territoireslibres.com/2021/01/sisyphe-ou-la-vie-au-service-des-petits-espaces-de-liberte/ ), je me permets également la liberté de vous partager une histoire:

Charles Péguy longeait un chemin en sifflotant, le cœur léger. Il croisa alors un homme au visage durcit par le dur labeur qu’il s’efforçait à accomplir. Charles l’interrogea :

« Bonjour mon brave! Dites-moi, que faîtes-vous exactement? »

« J’accomplie hélas le plus exténuant et le plus ingrat des métiers du monde : je suis casseur de pierres! Me voilà désormais avec des courbatures incessantes et des maux de toutes sortes en raison de ma tâche qui s’apparente à de l’esclavage! » Gémit fort l’ouvrier.

« Vous m’envoyez bien navré de votre situation, mon pauvre homme! » Se contenta de dire Charles, mal à l’aise d’avoir posé la question.

En poursuivant sa route, il croisa un nouvel inconnu, qui s’affairait à marteler le roc d’une massue. Par curiosité, Charles lui demanda s’il était également un casseur de pierres. L’inconnu acquiesça, en ajoutant : « Voyez-vous, il ne s’agit pas du métier le plus facile qui soit, mais au moins, je peux ainsi subvenir aux besoins de ma famille. Je suis donc reconnaissant d’avoir ce boulot. »

C’est intéressant, songea Charles en reprenant ses pas. Il croisa un troisième personnage, qui manifestement, était aussi un casseur de pierres. Charles lui demanda néanmoins ce à quoi il s’affairait. Celui-ci, avec une posture fière, lui expliqua avec enthousiasme: « Moi, Monsieur, je construis une cathédrale! »  

Cette histoire illustre à merveille que le sens ou la perspective que l’on porte aux événements a une influence indéniable sur notre manière d’appréhender l’existence. Un de mes éminents professeurs d’université à qui j’ai raconté ce récit, l’a commenté autrement… Il aurait plutôt souhaité, à l’instar des casseurs de pierre, que soit traîné de force le bourgeois ayant donné l’ordre de construire la cathédrale afin qu’il daigne offrir des conditions de travail dignes à son prolétariat. Mon cher prof nous rappelle que la responsabilité du bien-être n’est pas qu’individuelle, elle est collective.

Toutefois, voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide, ou faire sens aux difficultés, ne me semble pas aboutir à ignorer les injustices sociales ou se résigner à celles-ci. C’est plutôt percevoir pleinement la réalité telle qu’elle est et trouver des stratégies pour s’en sortir, ou être heureux malgré tout. Cela peut même insuffler du courage et de la combativité à travers des luttes sociales. Plutôt que de se décourager et baisser les bras, cela permet d’envisager les scénarios possibles afin d’amener des solutions.

Je dirais même qu’ultimement, c’est faire preuve d’humilité envers la vie : faire confiance que les événements positifs ou négatifs font partie d’un grand plan qui nous permet de grandir et d’être accompli. Avec du recul sur les événements négatifs, on se rend souvent compte qu’ils font sens et nous ont permis d’emprunter des voies qui, finalement, furent bénéfiques.

Je me permets une dernière brève histoire pour clore cet article. C’est l’histoire de Sean, un jeune garçon de 13 ans atteint pour la troisième fois d’un cancer en phase terminale. Il s’est torturé les méninges à se poser la question : « pourquoi moi? », jusqu’au jour où il s’est plutôt posé la question « pourquoi PAS moi? ». Il a songé que si la maladie l’assaillait en si jeune âge, cela était possiblement porteur de sens : écrire son expérience et souligner l’importance de profiter au maximum de chaque instant. L’histoire de Sean fut publiée par le coach de vie Martin Latulippe et s’intitule « 10 aiguilles » (https://www.amazon.ca/-/fr/Martin-Latulippe/dp/2896271309 ), car Sean avait peur des aiguilles malgré les innombrables fois où il a dû être piqué au cours de ses hospitalisations.

Sean a fait preuve d’une incroyable et admirable sagesse lors de son court séjour sur Terre! Il a compris et nous a légué le pouvoir presqu’infaillible de l’esprit malgré les adversités.

Un jeu vidéo pour sauver ou détruire le monde

Par Beatrix Potter

Sera traité dans cet article : jeux vidéos, nature humaine, entrecroisement entre la paix et la violence & histoire des mouvements sociaux

Nous sommes à table, en famille, savourant en silence le poulet fumé préparé avec soin par mon frère – qui habite avec nous et qui remplit savamment le rôle de chef cuisinier. La cacophonie ambiante si familière à notre foyer laisse place au silence lorsque nous goûtons à ses repas. Je brise le silence avec une idée saugrenue, qui sera suivie d’un vif débat.

« Et s’il existait un jeu vidéo avec un monde post-apocalyptique, où le but ultime serait de créer une ville la plus écoénergétique possible? »

Survient alors des pouffements de rires des mâles qui m’entourent, c’est-à-dire mon conjoint, mon frère et mes garçons.

« Personne ne jouerait à ton jeu vidéo! » tranche avec conviction mon frère.

« Pourquoi? De mon côté j’aimerais jouer à un pareil jeu! Pourquoi que ça serait pas populaire un jeu éducatif qui développe la conscience sociale? »

Cette fois-ci, les pouffements de rires sont remplacés par une hilarité générale. Je commence à être agacée. Mon frère tente de m’expliquer que je ne rejoindrais pas les profils typiques des joueurs de jeux vidéo. Si un combat ou de la violence n’est pas impliquée, ce sera voué à l’échec. Je tente donc de me reprendre.

« D’accord, d’accord… Alors imaginons un jeu en ligne interactif où les joueurs décident, toujours dans un monde post-apocalyptique, s’ils sont dans le camp des bâtisseurs d’une ville éco-responsable, basée sur une gouvernementalité partagée entre les citoyens et une redistribution des richesses… Ou sinon faire partie d’un clan nomade, armé et qui tente d’envahir la ville. La fin du jeu serait déterminée par les capacités diplomatiques afin d’éviter une guerre et… »

L’effervescence de mes idées est arrêtée net par mon frère, qui tente encore une fois de me ramener à la réalité de l’univers virtuel des jeux vidéos.

« Autrement dit, si je te suis, tu donnes le choix aux joueurs de se ranger du côté de ceux qui ont des armes, ou ceux qui souhaitent emprunter la voie diplomatique… »

« Oui, exact! »

« Le résultat conséquent sera qu’il n’y aura aucun joueur dans le camp sans arme… » ajoute mon frère.

Mon conjoint renchérit en déformant totalement l’essence initiale de mon jeu :

« Imaginez plutôt un jeu en ligne où les joueurs pourraient faire ce qu’ils veulent. Violer, piller, tuer… Sans évidemment se faire remarquer par les autres… Bref, un jeu où chacun pourrait faire ressortir sa véritable nature! »

STOP… On arrête tout! Ce n’est pas ma conception de la « véritable nature » humaine! En l’espace de quelques minutes de discussion, on est passé d’un jeu où le meilleur de l’humanité peut s’exprimer, à un jeu où jailli ses côtés triviaux les plus sordides.  

Je n’abandonne pas notre joute verbale, déterminée à les convaincre qu’un jeu empruntant une voie pacifiste peut être attrayant :

« Ok… Nouvelle idée… Pour éviter une troisième guerre mondiale avec une menace du recours au nucléaire, le joueur est un leader d’un mouvement social planétaire visant à renverser des gouvernements… Le tout dans une lutte révolutionnaire qui doit éviter à tout prix le recours à la violence, mais plutôt opter pour des stratégies diverses comme… »

Je me fais encore une fois couper dans mon enthousiasme par mon frère :

« Le début était prometteur jusqu’à ce que tu arrives avec la partie intellectuelle… Je me rappelle d’un jeu qui était profondément philosophique et réfléchi sur l’intelligence artificielle. Il n’a pas connu de succès, parce que les vidéos explicatifs étaient trop longs, malgré qu’ils étaient graphiquement magnifiques. Ce que tu proposes nécessiteraient de longues mises en situation qui risqueraient d’ennuyer les joueurs ».

Mon fils aîné a donné le coup de grâce, celui qui m’a mise en échec et math :

« Je jouerais à ton jeu, maman, si le mouvement social dont tu parles possèderait des armes pour défaire les gouvernements! »

Cette discussion m’a fait reculer un peu dans le temps. Montréal-Nord, 2008, Fredy Villanueva, 18 ans, décède alors qu’il jouait aux dés dans un parc par des balles des forces policières. Des jeunes, pour la plupart racisés, se révoltent dans les rues, applaudis par les résidents. Le Québec n’est pas un cas isolé. La colère sociale se manifeste un peu partout sur la planète contre les institutions qui ne défendent pas les intérêts des chômeurs, des étudiants, des sans-papiers, des migrants, bref, des « exclus ». Songeons aux émeutes de Cincinnati (2001), de la Kabylie (2001), de Benton Harbor (2003), de Cronulla (2005), de Pékin, Hong Kong et Chengdu (2005), des banlieues françaises (2005), de Bruxelles (2006), ou les émeutes de Minneapolis survenues en 2020 après le meurtre de George Floyd par un officier de la police…

Les institutions sont supposées permettre aux citoyens de prendre part au débat public, ou encore, de représenter les intérêts de ces-derniers. Or, les partis de gauches, les syndicats ou les médias peinent désormais à remplir ces rôles. Si les syndicats représentaient vaillamment les intérêts des ouvriers face à l’élite au début du 20ème siècle, ils semblent moins combatifs en ce 21ème siècle. Les partis de gauches se sont également éloignés des classes moins nanties. Enfin, les médias se préoccupent peu de la diversité médiatique au dépend des informations sensationnalistes.

Peut-on reprocher aux révoltés de s’approprier les rues et de tenter d’être pour une seule fois entendus quant à leurs besoins de justice sociale, n’ayant plus confiance ni aux forces de l’ordre, aux médias ou les autorités publiques. N’est-ce pas leur unique issue?

Emprisonné, Vaclav Havel, un meneur contre le gouvernement communiste tchèque, écrit en 1978 un essai, « Le Pouvoir des sans-pouvoir », dans lequel il dénonce les mécanismes de l’État qui réduisent les influences des citoyens ordinaires sur leur existence. Ces mécanismes aboutiraient à la résignation et à la démission morale, stérilisant les dynamiques sociales. À travers son parcours ou son essai, Havel se fait pourtant un fervent défenseur des résistances non violentes.

Des manifestations pacifistes ont souvent pris forme en parallèles aux révoltes plus musclées. Pour prendre des exemples récents, les manifestations pacifistes en lien avec le mouvement Black life matters, ou encore, les centaines de personnes qui se sont présentées à la colline parlementaire pour dénoncer le racisme systémique ayant mené à la mort de la femme Atikamekw Joyce Echaquan au Québec.

La non-violence a été popularisée dès 1921 par Gandhi en Inde, par la notion d’ahiṃsā (« négation à la violence »), un des fondements de l’hindouisme et du bouddhisme. La  résistance passive peut recourir à diverses formes afin d’atteindre des visées socio-politiques; cela au moyen de protestations symboliques, de non-coopération économique ou politique, de désobéissance civile, l’art protestataire ou d’autres méthodes.

Plusieurs personnages historiques ont d’ailleurs eu recours à des formes de résistances non-violentes. Pour en nommer un notoire, songeons à Martin Luther King pour la lutte des Noirs américains contre la ségrégation. Ou encore, songeons à Adolfo Pérez Esquivel, aujourd’hui âgé de 90 ans, qui fut un artiste argentin engagé et nommé en Colombie en 1975 le coordinateur général pour l’Amérique latine de tous les groupes et mouvements qui travaillent pour la libération par des moyens non-violents, cela afin d’organiser des actions et des politiques communes face aux oppressions et aux dictatures.

Plusieurs femmes héroïques ont recourues à des formes pacifistes de résistance pour changer le monde. Sans surprise, ces femmes demeurent invisibles, non connues. Je me rappellerai à jamais l’histoire entendue lors d’une conférence de cette surprenante enseignante, qui avait refusée d’être délocalisée de son village tel qu’exigé par son gouvernement en vue de construire un complexe industriel. L’armée était en route pour éteindre son étincelle de rébellion. Solidaires à son refus de partir, des villageois s’étaient dressés entre l’armée et la résidence de cette femme qui leur tenait tête, refusant le sort fatal que lui réservait les soldats. Cette foule de villageois chantait, attendant possiblement leur propre mort, mais fermement résolus à ne pas abandonner l’enseignante et la cause qu’elle portait. Devant ce spectacle touchant, les mercenaires ont rebroussé chemin. Le village et ses habitants furent ainsi épargnés.

Cette histoire me donne des frissons dans le dos, m’insuffle un sentiment d’élévation de l’âme. Au final, qui est le plus courageux? Celui qui se défend contre la violence par les armes, ou celui qui se présente, mains nues devant son adversaire? Cette deuxième voie est-elle folie, ou plutôt grande sagesse morale?

Peut-être qu’un jeu vidéo virtuel ne favorise pas les voies pacifistes pour « sauver le monde », mais lorsque de vraies vies humaines sont en jeu, j’espère que l’on priorisera l’option pacifiste dans le menu déroulant des possibilités.

Liberté et territoires, deux notions à faire dialoguer avec un peu de philosophie

Par Beatrix Potter

Sera traité dans cet article: l’esprit libre sans limite, les limites à la liberté solidaire & la conscience et l’équité pour des territoires plus libres

Peut-on être libre sans aucune limite? Ou peut-on envisager un territoire sans envisager des frontières qui le délimitent? Ces questions me sont apparues étrangement durant les fêtes, alors que j’écoutais le film Dounia avec mon plus fils cadet. Ce film sublime illustre le courage avec lequel une famille fuit la guerre civile et prend la route des migrants dans l’espoir de dénicher une terre où ils pourront vivre en toute sécurité. Empreint de sagesse, un passage a attiré mon attention. Un personnage explique que l’humain fut intemporellement tiraillé entre sa soif de découverte et son besoin d’enracinement. Les sages auraient finalement réalisé que la véritable liberté s’acquiert en ayant développé ses racines.

Cette manière d’envisager l’interrelation entre la liberté et le territoire me fait songer à la réflexion que m’avait partagée jadis une amie, qui pour remédier à ses anxiétés liées aux voyages, avait pris la ferme décision de « se sentir chez elle peu importe son emplacement dans le monde ».

La principale assise à la liberté ou à la possibilité d’habiter un territoire résiderait donc au sentiment de sécurité. Des conditions d’existence extrêmement difficiles dans plusieurs endroits du globe mettent à mal la liberté d’être soi, la liberté de se mouvoir ou la liberté de s’exprimer sécuritairement.

Pensons à Nelson Mandela, qui fut un exemple extraordinaire de dévouement pour son pays, refusant la liberté pour demeurer en cohérence avec ses valeurs d’égalité raciale. Il fut emprisonné 27 années pour ses idées. Il pardonna ensuite à celui qui l’avait jeté en prison afin d’entamer des négociations avec le gouvernement au pouvoir et ainsi éviter une guerre civile à la République d’Afrique du Sud.

Au final, Nelson Mandela n’a peut-être jamais cessé d’être libre d’esprit par l’entremise de son imagination. Il n’a cessé d’imaginer un pays plus lumineux à travers son vivant. C’est grâce à l’imagination que même un prisonnier peut s’évader en pensée dans des territoires plus libres.

Kant disait d’ailleurs que l’imagination est l’instance où l’homme peut transgresser ses limites. Ou encore, pour citer le philosophe français Jean-Jacques Wunenburger : « l’imagination représente ce par quoi l’homme fait l’expérience de l’autre, de l’ailleurs, de l’illimité et en fin de compte, du sacré. ».

La conscience est également un ingrédient actif favorisant l’ébullition d’un esprit libre en philosophie. Baruch Spinoza, philosophe néerlandais du XVII ème siècle, nous indique que les hommes se croient libres parce qu’ils sont conscients de leurs désirs, mais en réalité ils ne le sont pas s’ils ignorent les causes qui les déterminent.

La pleine conscience de ce qui se passe en nous et autour de nous engendrerait une myriade de possibilités afin de se sentir plus libre et enlignée sur sa profondeur d’être, plutôt que de se sentir coincé et balloté dans une existence subie :

  • Se libérer des lourdeurs émotionnelles du passé,
  • Se sentir pleinement vivant en profitant de l’instant présent,
  • Admirer d’avantage la beauté,
  • Ne pas ruminer nos jugements ou nos inquiétudes,
  • Se libérer des caprices de notre ego,
  • Mieux se connaître et ainsi faire des choix en cohérence avec nos valeurs,
  • Une plus grande ouverture aux opportunités,
  • Acquérir la paix d’esprit, la sérénité,
  • Répondre avec conscience aux événements plutôt que d’y réagir.

Encore faut-il développer le réflexe de s’arrêter et d’observer afin d’atteindre cette conscience. Le capitalisme et sa course incessante à la productivité nous mène souvent ressentir de la culpabilité en prenant du temps pour soi ou à ne rien faire. Nous sommes devenus en quelque sorte conditionnés, pris dans des comportements devenus automatiques, sans nous questionner nécessairement sur le pourquoi.

« Je pense, donc je suis » a judicieusement énoncé Descartes au XVII ème siècle.

Pourquoi voulons-nous plus d’argent? Pourquoi voulons-nous plus de temps? Quel est l’essentiel de notre bonheur et nos actions quotidiennes permettent-elles de l’atteindre? Sommes-nous capables de remises en question, d’introspection et d’accueillir ce qui diffère, la nouveauté ou d’autres possibles?

Je crois sincèrement qu’il existe des liens solides entre les notions de territoires, de liberté, de conscience, de solidarité et d’équité. Un célèbre dicton va dans ce sens : « La liberté des uns s’arrête là où celle des autres commence ». Peut-on vivre librement sur Terre alors que les inégalité sociales nous éloignent les uns des autres et renforcent notre replis sur soi?

En guise d’exemple illustratif, à l’aube d’une catastrophe écologique planétaire sans précédent, l’éveil des consciences et la solidarité entre toutes les nations ne furent jamais autant nécessaires. La conscience suit généralement ce chemin : l’observation, l’acceptation et l’ouverture aux changements. Accepter l’inévitable crise qui bouleversera nos manières de vivre ensemble consiste en la première étape. Ensuite viendra des initiatives ayant pour visées un mieux savoir-être et savoir-faire dans un dessin de mieux savoir-vivre ensemble.

L’individualisme cherche à accaparer toutes les libertés ou les ressources pour lui-même, n’ayant cure d’autrui. La solidarité et l’équité offrent des conditions où chaque humain peut aspirer à la meilleure version de lui-même, à une vie plus morale.

John Stuart Mill, philosophe et économiste, a réfléchi à la dualité entre l’individualité et la collectivité dans son essai « De la liberté » en 1859. Il y est question d’un juste équilibre entre les libertés individuelles et le cadre que doit imposer l’État afin de protéger les droits de propriété et favoriser la redistribution des richesses.

Bref, le territoire auquel nous appartenons, nous devons en prendre soin. Pris au sens large, le territoire commence par notre maison, puis notre communauté, s’étend à notre nation, jusqu’à notre planète. Nos libertés et notre niveau de bohneur dépendent ainsi grandement de ceux des autres, irrémédiablement liés. Les pays offrant une meilleure redistribution des richesse affichent sans surprise des indices de bonheur plus élevés que les pays connaissant un accroissement des inégalités sociales.

Vous vous rappelez de ma question initiale : Peut-on être libre sans aucune limite? Ultimement, je répondrais que l’esprit libre n’a aucune limite et ne doit pas être borné par ce qu’il connaît déjà. L’esprit conscient se libère des conditionnements qu’on souhaite lui imposer et cherche à les changer ou les contourner. L’esprit conscient et solidaire s’impose des limites afin que tous puissent jouir des mêmes libertés que les siennes. Discipline, compassion et sens de la responsabilité collective sont probablement les bases de la solidarité.

Ma deuxième question : Peut-on envisager un territoire sans envisager des frontières qui le délimitent? Dans ma vision utopiste d’une humanité plus libre et solidaire, il n’existerait plus de frontières géographiques. Les différences culturelles seraient valorisées et ainsi estimées comme toutes légitimes d’exister avec une redistribution équitable des ressources.

En sommes, ce que je défends, c’est que tous les territoires soient libres! Si, tel le disait Spinoza, « notre capacité d’agir dépend de notre capacité d’être affecté par le monde » et bien je nous souhaite de plus en plus de conscience sur comment les privilèges de certains groupes en défavorisent d’autres. Je nous souhaite d’avantage d’amour pour nos prochains indépendamment de leur couleur de peau, de leur appartenance culturelle, de leur classe sociale, de leur genre, ou de leur âge.

Dans mon élan révolutionnaire, je vous laisse avec ces citations inspirantes qui nous permettrons dans ces visées de nous unir avec d’autres pour réaliser ce que seul serait irréalisable.

« Ne doutez jamais qu’un petit groupe d’individus conscients et engagés puisse changer le monde. C’est d’ailleurs de cette façon que cela s’est toujours produit ». Margaret Mead

« Vous nous disiez peut-être trop rêveurs, mais nous ne sommes pas seuls. Nous espérons qu’un jour vous vous joindrez à nous et le monde ne sera qu’un grand tout unifié et solidaire ». John Lennon.